EMPLISSEZ LA TERRE ET SOUMETTEZ LA
Le 2 février, le Pape François a publié une exhortation apostolique post-synodale sur l'Amazonie. Quasiment dans le même temps, une épidémie de coronavirus a commencé à inquiéter sérieusement l'humanité. La conjonction de ces deux événements nous invite à réfléchir plus profondément sur notre lien à la création. Dans un cas, une sur-exploitation de la nature à des fins uniquement économiques et financières pose question, de l'autre, la nature semble "se révolter" en étant à l'origine d'un phénomène qui aujourd'hui incontrôlable. Il paraît ainsi important de prendre du recul et de re-réfléchir à notre lien au monde.Peut-être que, dans un excès de confiance en la science, on a cru qu'on était maîtres du monde. Or on constate que la nature nous échappe et rappelle d'elle-même ses propres droits. Elle nous est confiée, certes, elle est un don… mais ce n'est pas pour en faire n'importe quoi. "Emplissez la terre et soumettez-la" dit le Seigneur dans la Genèse. Il nous confie une réelle maîtrise, mais avec aussi une responsabilité de respect et de "bien gérer" le don qu'il nous fait. "Qu'as-tu fait de ton frère ?" dira le Seigneur à Caïn. Cette même question peut nous être posée par rapport à la nature: "Qu'as-tu fait du don que je t'ai fait ?"… nous savons que nous aurons au moins à rendre compte pour nos talents, mais nous savons aussi que Dieu attend de nous que nous soyons en premier "de bons gérants de la grâce de Dieu sous toutes ses formes" (cf 1P 4,10). Ceci rejoint le thème de l'"écologie intégrale" développé par l'enseignement des Papes.
Face au coronavirus, il ne faut pas céder à la psychose. Ce qui est aujourd'hui source d'angoisse est le fait qu'on n'a pas de médicament pour répondre à cette forme d'attaque. Rappelons-nous cependant que, dans le nombre de personnes infectées, le ratio de cas mortels reste heureusement faible. Rappelons-nous aussi que, même si on est atteint par la maladie, notre corps est suffisamment bien fait pour développer lui-même des anticorps et combattre. Acceptons aussi de nous plier aux quelques règles de précaution et de bon sens qui sont mises en place pour éviter le plus possible la propagation de la maladie. Ne cédons pas aux sirènes de "faux-prophètes" qui proposent des remèdes miracles ou des protections garanties mais ne cherchent qu'à abuser de la crédulité et de la fragilité des gens.
Il me semble qu'à travers cette épreuve que nous traversons le maître-mot est l'humilité. Le carême ne nous rappelle-t-il pas que "nous sommes poussière et que nous retournerons à la poussière" ? Humilité devant un phénomène que nous ne maîtrisons pas, humilité de la confiance, humilité des règles sanitaires, humilité de notre condition… mais Dieu n'est-il pas celui qui, à la fin, "élève les humbles" ?
P. Yann POINTEL