IL EST VENU DONNER SA LUMIÈRE
Dans la nuit de Noël, nous allons réentendre ce beau passage du prophète Isaïe:
"Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière; sur ceux qui
habitaient le pays de l'ombre, une lumière a resplendi" (Is 9,1). Oui, ce petit enfant que
nous allons accueillir est venu nous donner sa lumière. Il est encore plus profondément
"Lumière née de la Lumière", c'est-à-dire la source même, capable d'illuminer la vie de
tout homme.
Que verrons-nous à la crèche ? Nous verrons un petit enfant qui se présente
fragile, innocent, sans arme, livré à l'amour. Telle est la manière par laquelle Dieu a voulu
entrer dans le monde: non pas dans le faste des palais, non pas avec un déploiement
d'artifices et de puissance, non pas entouré par une armée de mercenaires, non pas au
milieu de quelques privilégiés qui n'auraient eu accès à lui qu'après avoir montré badges,
certificats et tampons, mais de la manière la plus humble, capable de rejoindre chaque
homme: il s'est fait petit enfant, offert à l'amour, acceptant la modeste crèche qui reste
seule pour le recevoir.
Cette crèche désarme nos superficialités: "Au fond, m'aimes-tu ?" Qu'est-ce qui
est finalement le plus important dans ta vie quand il ne reste plus rien des apparences, des
faux-semblants, des cache-misères, des mauvaises excuses, des allures de bonne-figure,
des jeux de personnages qui font illusion pour les hommes, mais pas pour Dieu ? La
lumière qui émane de la crèche nous ramène à l'essentiel. A quoi perds-tu ton temps ? – Il
suffit d'aimer.
Ce que nous offrons à cet enfant est bien pauvre, mais cette pauvreté ne le rebute
pas. Nul n'est trop pauvre pour ne pas être digne de Dieu. C'est lui qui vient nous enrichir.
Il vient redire à chacun –depuis le plus petit– qu'il est aimé, qu'il a du prix à ses yeux. Les
bergers repartirent tout joyeux, "glorifiant et louant Dieu" (Lc 2,20). La lumière de cet
enfant est une lumière d'amour.
La tradition provençale a merveilleusement imaginé le retournement du
Boumian, du Pistachié et du Gendarme dans la pastorale des santons de Provence, du
fainéant Meunier qui retrouve l'envie de travailler, et même de Roustido, le sans-coeur,
qui se sent devenir meilleur. Heureuse imagination qui a perçu que la lumière qui émane
de cet enfant est une lumière qui transforme, nous invitant à repartir différents: en
montrant le vrai visage de notre coeur.
La lumière de cet enfant nous a été confiée au baptême: nous l'avons reçue non
pour la mettre sous le boisseau, mais pour qu'elle brille (cf Mt 5,15). Déjà le 8 décembre,
fête de l'Immaculée Conception, nous pourrons mettre à nos fenêtres des bougies qui
témoigneront de notre foi en honorant la Très Sainte Vierge Marie. Mais au-delà de ce
geste, que notre foi rayonne, que nous brûlions de l'envie de propager la lumière qui
émane de l'enfant Jésus.
A la crèche commence une merveilleuse histoire qui passera par la croix, mais
qui ira jusqu'à la résurrection. "La lumière a brillé dans les ténèbres, et les ténèbres ne
l'ont pas arrêtée" (Jn 1,5). La lumière du Christ n'est pas ce feu de paille d'un moment qui
fait sensation périodiquement pour quelques instants de fête et puis après s'éteint, elle est
une lumière capable d'illuminer toute une vie, une lumière capable d'éclairer même les
moments les plus difficiles. La lumière qui émane de cet enfant est une lumière
d'espérance, plus encore, elle est une lumière de victoire, puisqu'au terme, c'est elle qui a
le dernier mot sur tout mal.
Que nous nous réjouissions de cette lumière, lumière essentielle, lumière
d'amour, lumière qui transforme, lumière qui rayonne, lumière d'espérance, lumière de
victoire, parce que Jésus est venu nous donner sa lumière, une lumière qui, comme
l'amour, "ne passera jamais" .
P. Yann POINTEL