UN NOUVEAU CURE
L'arrivée d'un nouveau curé dans une paroisse est toujours chargée d'interrogations et de promesses: Tandis que les uns s'inquiètent ("Pourvu que rien ne bouge!"), d'autres aspirent à de nouveaux projets, de nouvelles initiatives ("Enfin un peu de sang neuf!"), d'autres peut-être restent spectateurs ("Attendons de voir!"). Autre curé, autres compétences, autres talents. Que soient ici remerciés les Pères Michel ROUX et Jean-Claude DUHOUX, mais aussi Mgr Denis HONNORAT pour tout le bien qu'ils ont fait à Saint Antoine et Saint Eugène ces derniers temps, soit comme curés, soit dans les célébrations dominicales. Merci ! Un nouveau curé ne peut ni reproduire, ni imiter ni remplacer ses prédécesseurs, il est seulement lui-même, choisi, appelé et envoyé par le Christ, missionné par l'Eglise à travers l'archevêque, vivant le premier dans sa vie les grands élans de foi de tout disciple –capable de dire à Jésus avec St Pierre: "Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant" (Mt 16,16)– et moins glorieusement arpentant les chemins du repentir et du pardon, lorsqu'après s'être éloigné, il faut bien revenir et reconnaître: "Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t'aime" (Jn 21,17).
Dans cette mission de curé, je me confie à votre prière, mais un tel changement nous renvoie plus fondamentalement chacun, chacune, à notre propre appel: Qu'est-ce qu'une paroisse ? Pourquoi une église au milieu des maisons de ce quartier ? Vivons-nous ce que Dieu souhaite, et y sommes-nous fidèles ?
Le Pape François nous a rappelé, dans Evangelii Gaudium, combien le message de l'évangile est avant tout une Bonne Nouvelle, et elle l'est parce que le cœur est la rencontre du Christ, rencontre qui produit la joie: joie de découvrir qu'on est aimés, joie de découvrir le salut. Qu'est-ce qu'une paroisse si ce n'est un lieu privilégié pour faire la rencontre du Christ, pour nourrir cette rencontre, et pour avancer ensemble, en hommes et femmes qui se sont laissés toucher par Dieu, qui veulent se mettre à sa suite: mieux le connaître, écouter sa voix, rester avec lui ?
Alors certains paroissiens sont des fidèles, qui viennent régulièrement à la messe, qui prient, qui cherchent Dieu, qui veulent mettre en pratique ses commandements. Nous en sommes ! La paroisse doit être ce lieu où nous pouvons être nourris, où nous allons pouvoir avancer, où nous serons stimulés dans la vie chrétienne. Est-ce que c'est bien le cas ?
Dans la paroisse, certains sont baptisés, mais "sans plus". Est-ce que ce que nous allons vivre ensemble sera suffisamment bon, consistant, porteur, rayonnant, attirant, pour que nous ayons le zèle de le partager et de donner envie à ceux-là d'aller plus loin ? "Si tu savais le don de Dieu" (Jn 4,10) !
Et dans la paroisse, d'autres ne connaissent pas Dieu ni Jésus ou l'ont toujours refusé. Comment l'Eglise –Mère– peut-elle laisser de côté certains sans désirer qu'ils rejoignent la grande famille des enfants de Dieu ? "Vous êtes la lumière du monde" (Mt 5,14) qui n'est pas faite pour être circonscrite à la vie privée ni étouffée. Comment, avec douceur, avec délicatesse, portons-nous le souci de la brebis perdue, la mission d'apporter la lumière du Christ à ceux qui ne l'ont pas encore découverte ou reconnue ?
Ce n'est pas le curé seul, mais c'est tous ensemble que nous répondrons à l'appel du Christ à être cette présence de foi dans notre quartier, à être pour lui un peuple consacré, un peuple animé par sa présence, un peuple docile à sa parole, un peuple ardent, un peuple missionnaire. Que par le don de l'Esprit Saint il suscite des initiatives, il ravive ce qui s'attiédit, il confirme et enracine ce qui porte du fruit, il indique ce qui est à changer, il nous rende attentifs aux appels, aux attentes, il nous donne en un mot de porter du fruit, un fruit de vie éternelle.
P. Yann POINTEL